Ton dernier chapitre mamie …

L’année dernière, pour tes 90 ans, tu nous a remis un livre.
Ton livre « Le roman de M. », l’histoire vraie de ma mamie. Ecrit avec ton cœur, pour tes enfants et surtout tes petits enfants.
Pour qu’on se souvienne, pour qu’on connaisse nos origines et notre histoire.
Et elle a été bien remplie ta vie, mamie.
Je crois que c’était essentiel pour chacun de tes petits enfants de connaître l’histoire de notre famille tant elle est riche de diversité.

Aujourd’hui nous te disons au revoir et j’avais envie de partager un petit bout de toi ici. 

Cette histoire débute en 1924, lorsque tu née au Soudan, de parents Syriens, tout deux originaires d’Alep. Tu y a appris à parler anglais, arabe, italien et français, quatre langues que tu maîtrisais parfaitement.
Tu épouses Papy, libanais né en Ethiopie, en 1945, rencontré lors de l’un de tes trajets entre le Soudan et l’Ethiopie où habitait l’une de tes sœurs.
Vous avez mené jusqu’en 1974, pendant le royaume de Haile Selassie, une vie très aisée, entourés des 4 enfants que vous avez eu ensemble.
La révolution Éthiopienne de 1976, vous a fait perdre tout ce que vous aviez, en confisquant les entreprises et en mettant les propriétaires en prison, dont Papy.
Tu rejoins alors l’un de tes fils, mon papa qui était parti faire ses études en France, laissant à contre-cœur Papy, qui réussira à rejoindre la France en 1981.
Vous avez continué à voyager notamment pour aller rendre visite à tes sœurs qui avaient migrés en Australie (pays que je rêve, par ailleurs, de visiter pour aller à la rencontre des mes cousins issus de germain).
Papy te quitte après 62 ans de vie commune (!!!).
Votre « vie n’a pas toujours été rose, ni moche non plus mais plutôt heureuse » (c’est toi qui l’écrit).

Ta grande passion, mamie c’était de t’occuper des fleurs et des jardins. Je me rappelle des heures que tu passais dans ton jardin puis des innombrables plantes que tu entretenais avec amour sur ton balcon quand vous êtes passés en appartement. Certaines ont aujourd’hui 35 ans !
Et puis le goût des jeux de cartes. Les nombreuses réussites, où tu déplaçais discrètement une carte pour gagner. Les parties de canasta à chaque fois qu’on venait te rendre visite, les parties de backgammon avec papy et le bridge avec vos amis. Tu n’aimais pas perdre et papy te laisser souvent gagner !! Jusqu’au bout tu auras joué aux cartes avec les autres résidents de la maison de retraite et tes enfants ou petits enfants de passage.
Et aujourd’hui encore, les fêtes de famille se terminent souvent autour d’une partie de carte entre cousins.
L’ordinateur et internet sont entrés dans ta vie alors que tu avais 80 ans. Lors de nos visites, nous te faisions des fiches mémos pour que tu apprennes à t’en servir ! Tu étais heureuse de pouvoir communiquer avec les membres de ta famille dispatchés aux quatre coins du monde. Et tu pouvais aussi faire tes réussites sur l’ordinateur (même si tu ne pouvais plus tricher !).

Dimanche, tu es partie…laissant derrière toi une famille unie et aimante.
Tu es partie avec l’image de cette belle famille, de ces quatre enfants qui ont construits leurs vies et avec la fierté de voir tes petits enfants et arrière petits enfants heureux dans leur vie.
« Je souhaite à mes enfants, ainsi qu’à mes petits enfants et arrières petits enfants, une vie aussi belle, longue et heureuse que fût la mienne »...c’est la conclusion de ton histoire et le continuité de la notre.

Merci Mamie pour les valeurs que tu nous as transmises, pour les repas de famille faits de rires et de bon plats éthiopiens et libanais.
MABROUK (=félicitations), comme tu nous le disais souvent, pour cette vie bien remplie !

Où que tu sois parti, j’espère que tu as retrouvé Papy, l’amour de ta vie, et ta petite fille, notre cousine, partie bien trop tôt …

Je t’aime Mamie.